lundi 6 février 2017

Euromédocain

Lesparre, gros village de plus de 5000 habitants lui permettant d'accéder au rang de petite ville, parfaitement géocentrée, qualité naturelle majeure lui donnant le statut de Capitale de son territoire péninsulaire et sous-préfecture du département pour la cohésion territoriale, le tout au sein de la plus grande région française.

A quelle valeur nous identifions nous le plus ? quartier, ville, pays, département, région, nation, continent, toutes ces notions n'ont vraiment d'utilité que dans la mesure où elles nous permettent de développer ensemble les singularités d'un peuple et continuer à enrichir le monde de nos différences. 

Identité d’un peuple et son environnement:

A l'heure des préoccupations éthologiques d'une part, pour la reconnaissance des peuples autonomes et de leurs identités intrinsèquement liées aux territoires qu'ils ont occupés bien antérieurement à leurs colonisations et des préoccupations climatiques impactant directement la biodiversité et notre propre équilibre, il est important d'en retenir des prises de conscience applicables à échelle locale et considérer d'un regard nouveau, la pensée qui animait les peuples autonomes: La terre ne nous appartient pas, c'est nous qui appartenons à la terre. 

Les occupants d’un territoire s’accommodent des avantages et des contraintes pour structurer leurs survies, puis transmettre l’acquis des connaissances en progrès prospère pour leur descendance.



C’est l’horizontalité locale de la terre qui doit être nécessairement reliée à une globalité pour ne pas péricliter par la stase. S'élever, se redresser, accéder à la verticalité en gardant les pieds sur terre pour ne pas finir hors sol, c'est ce que chaque peuple, à quelque échelle territoriale que ce soit, se doit de bâtir solidement pour sa survie en offrant aux futures générations de meilleures conditions de vie. Horizontalité et verticalité s'assemblent alors dans un modèle de société développé en épaisseur temporelle d'une civilisation capable d'intégrer les phénomènes de chaque époque avec notamment l'évolution des idées par l'accès à la connaissance et le rapport de chacun au spirituel, soit tout ce qui nous dépasse.
     

Identité d’un peuple dans son rapport à son temps:


L’identité n’est pas tant celle à laquelle nous prétendons mais plutôt celle que l’autre nous reconnaît. L’autre étant par essence différent, les identités ne sont reconnues que dans leur rapport agissant à leur temps, à leur époque, leur lien au monde et aux opportunités ou menaces qui se présentent depuis le grand autre. 


Une époque exprime la verticalité de la pensée agissante, la volonté globalisante et expansive de la poussée de la vie pour elle même, qui doit être raisonnée et adaptée à chaque environnement local pour ne pas sombrer dans la "démocrature".

L’identité d’un peuple nait donc comme le feu, en frottant deux essences d’arbres différents, son rapport à son environnement confronté à son rapport à son temps.

En MEDOC comme ailleurs, Il n’y a pas d’identité d’un peuple sans culture, il n'y a pas de culture sans le rapport à la terre qui nous nourrie.

Le MEDOC a un destin à révéler tôt ou tard et chaque époque propose plus ou moins opportunément des enjeux particuliers, dans la confrontation entre son origine et l’hyper actualité.

En ce début de XXI° siècle, il s’agit d’assembler l’identité agriculturelle fortement menacée et la transition numérique en expansion, sur un territoire vierge à forte valeur symbolique, en exemplarité pilote d’une Europe forte de l’expérience des guerres et de l’histoire des idées.   

Le régionalisme obéi, à une échelle maltusienne moindre, au même paradigme que le nationalisme.

Il s’agit de réunir sous une bannière commune, des populations rassurées par le partage solidaire de valeurs identitaires à défendre et rattachées à leur territoire, à leur pays qui en son temps, a sécurisé les anciens en leur permettant de devenir paysans sédentaires.

Dans le monde marchand globalisé, le nationalisme s’exprime aujourd’hui principalement en caricature édulcorée notamment lors des grandes manifestations sportives de masse avec le foot-ball comme figure de proue.

C’est l’occasion pour les différentes populations des pays participants de "sortir les drapeaux", la question du retour des nations et du nationalisme occupant alors les débats politiques​.


Le nationalisme oscille entre "nationalisme c'est la guerre” et "nationalisme le replis” comme garantie de démocratie et du vivre ensemble. Aujourd’hui, le pouvoir des multinationales et les enjeux relatifs à la mondialisation s’invitent à la table en déstabilisant l’électorat.
Nous touchons au tabou essentiel des sciences politiques depuis les années 1960. La démocratie est toujours incarnée, depuis l’Antiquité, dans une cité et à l’époque moderne, dans des communautés nationales. 


En franchissant les limites d’une cité, une démocratie sans territoire lisible n’existe pas. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’y a pas de démocratie européenne puisqu’il n’y a pas de territoire européen stabilisé et qu’en conséquence, il n’existe pas de nation européenne.

S’il n’existe pas de démocratie moderne en dehors de la nation, il existe en revanche des nations sans démocratie. Le nationalisme moderne est la forme collective que prend l’émancipation individuelle. La modernité n’a pas produit que des individus épris de démocratie.

Il serait faux, pour autant, d’affirmer que les nationalismes sont responsables de la Première Guerre mondiale. Cette formule a justifié toutes les attaques déconstructivistes contre les nations, après 1945, au nom de la lutte contre le nationalisme.

La Première Guerre mondiale naît du choc entre quatre volontés de conflit non maîtrisables: l’incapacité de Vienne à contenir le bellicisme de Budapest au sein de la monarchie austro-hongroise, conjointement à la volonté du régime tsariste russe, d’effacer la honte de la défaite de 1905 contre le Japon et enfin, le fatalisme du gouvernement et de l’armée allemande qui préfèrent en découdre immédiatement plutôt que de laisser France et Russie se réarmer un peu plus, le tout dans un mélange de haine de l’Autriche catholique et de revanchisme post-1870, largement partagé au sein des milieux dirigeants de la IIIè République. 


En 1914, les peuples partent en guerre par patriotisme, pour défendre la nation. Le nationalisme est surtout le fait de classes urbaines moyennes et supérieures. A l’époque, partout en Europe, ce qui était chic, ce n’était pas d’être bobo mais d’être nationaliste.

La nation est une structuration en pis aller et comme en toute chose, dangereuse si on la magnifie excessivement. La région peut avoir une résonance plus incarnée si l’on tient compte des pays qui la constituent de leurs exceptions paysannes.

L’émergence de la transition numérique doit être instruite en miroir de ce qui nous reste du monde agri-culturel, patrimoine mondial de l’humanité. 


Bien comprise et aimée avec justesse, toute organisation sociale se doit d'être une maison accueillante qui abrite une culture, des moeurs, une histoire, un destin venant révéler un peuple qui en a besoin, pour désirer un devenir meilleur, vivre paisiblement en s’attachant à des singularités exprimant son existence. Mal comprise, transformée en religion, idolatrée, la nation devient fauteur de guerres comme celles que le XX° siècle a subies, ce pourquoi la doxa du politiquement correct préfère parler de patriotisme, bien qu’il ne s’agisse pas tout à fait de la même chose.

Entre elles, les entités politiques se comparent et se concurrencent toujours et la concurrence peut prendre diverses formes. Les Grecs, habitant des cités qui se faisaient la guerre en permanence, avaient pensé que des jeux inter-cités pourraient établir une saine concurrence qui servirait éventuellement d’exutoire. C’est bien là où nous en sommes aujourd’hui. 

Mieux vaut la concurrence dans les stades que sur les champs de bataille entend-on souvent. Est-ce à dire que les politiques ne feraient alors qu’exacerber les volontés des peuples à en découdre, comme s’ils étaient des prestataires pervers basculant tout à tour et suivant leurs intérêts, entre verticalité de l’autorité visionnaire et responsable ou horizontalité de la raison du peuple ségolinisé du genre “ dites moi ce que vous voulez et je le ferai …”  Sur cette question, Lesparre aurait de quoi attraper le tournis, entre un peuple en déculturation progressive qui peine à s’exprimer, ne sachant plus ce qu’il veut et un Maire qui en profite pour guiraudiser du genre “ dites moi ce que vous voulez et je ferai ce que je veux …"   

Le problème réel reste que ni le Maire ni les Lesparrains ne le perçoivent réellement, sauf à dénoncer parfois certaines conséquences du problème. On peut difficilement soigner une maladie non diagnostiquée.On ne peut générer le sentiment d’appartenance à un peuple qu’avec une politique culturelle claire et capable d’être synthétisée en une phrase, un slogan non réducteur d’une ADN compréhensible par tous.

Quand le Maire, enfant du Pays déclare en conseil municipal qu’il n’aime pas le mot Paysan, nous avons accès au symptôme de la maladie par le mal à dire, le sentiment de honte que seuls les humiliés peuvent maquiller d’orgueil.

A Lesparre comme dans la plupart des villes à la campagne, nous sommes encore dans un schéma postmoderne du Ni Ni, ni une ville avec les avantages de son urbanité, ni une campagne fière de son monde paysan. A part les forces contraires de certains, rien ne s’oppose à l’assemblage heureux de cette source dichotomique. La prospérité dépend de la capacité d’un peuple à trouver sa force dans son ADN confrontée à sa contemporanéité. 

Qu’il s’agisse de nationalisme ou de régionalisme, il est nettement préférable que le mouvement opérant privilégie les valeurs démocratiques quand on sait qu’à terme, le nationalisme pour sa part, reste destructeur de la démocratie et de ses évolutions. 
Durant et après la première guerre mondiale, les nations qui ont la pratique la plus ancienne de la liberté, sont celles qui résistent le mieux à la poussée autoritaire, qu’elle soit fasciste ou communiste. Le nationalisme repose sur l’idée qu’il est absolument nécessaire d’unir le peuple contre un ennemi commun révélé, à chercher ou imaginaire. Le bouc émissaire, c’est aussi vieux que l’humanité. Bismarck le sait bien quand il unit l’Allemagne d’abord contre des ennemis extérieurs (Danemark, Autriche, France) puis contre des ennemis intérieurs (catholiques dans les années 1870 puis socialistes dans les années 1880). Mais ce faisant, Bismarck a empêché ce qui était le déploiement normal du sentiment national moderne: le parlementarisme et la démocratie. Bismarck est bien le père du nazisme dans la mesure où il a empêché le sentiment national allemand, conservateur ou libéral, de se déployer naturellement. La rencontre entre le bismarckisme et la Première Guerre mondiale enfante la bête immonde. 
Si le nationalisme est in finé l'instrumentalisation machiavélique du sentiment d'appartenance nationale et du patriotisme, faut-il en changeant d'échelle, appliquer la même analyse au régionalisme qui viendrait alors coloniser le sentiment d'attachement à une région ?

Il y a t-il un mot adapté à la région à poser à la place de Patriotisme ? Le Paysannisme …..??? et que l’on soit agriculteur ou pas, il y a certainement un vocable à trouver comme véhicule pour cette reconnaissance nécessaire envers tous ceux qui pourraient s'y reconnaitre, lorsqu’ils refusent peu à peu de pousser le caddie de leurs misères, tous ceux qui savent que privilégier le circuit court c’est entretenir leur santé tout en entretenant l’identité locale, la transmission du savoir, le lien entre les êtres, la résistance à la dérégulation par l’hyper consommation, tous ceux qui découvrent que le prix de la liberté c’est de pouvoir se passer des services offerts, tous ceux qui savent que si c’est gratuit, c’est qu’ils sont eux mêmes le produit ...
   
Nation, “natus” en latin, renvoie à la naissance, à l’origine. La nation, si elle n’est pas éduquée, est susceptible de tous les emballements, comme une bande d’enfants sauvages livrés à eux-mêmes. La patrie, le patriotisme, renvoient au “pater”, père en latin, donc à l’éducation, à la civilisation, à la transmission. Rousseau est le père du nationalisme moderne et il n’est pas étonnant qu’il ait pensé faux en matière d’éducation. Le nationalisme, dans l’Europe moderne, est souvent venu perturber la croissance naturelle, éduquée, d’un attachement patriotique qui s’exprimait à la fois par une dynastie incarnant la souveraineté et par un parlement organisant la liberté.

Pour qu’il puisse y avoir démocratie, il faut nourrir l’intérêt envers quelque chose en commun. On n’est citoyen que pour s’occuper d’un bien commun, appartenant à une entité. Cependant celle-ci n’est pas forcément une nation. Ce peut être une région, un pays, une ville, un quartier, un immeuble, un concept, une idée… 

Les limites du territoire du nationalisme sont les défis qu'il peut ou ne peut pas soulever dans le monde contemporain. Le danger serait plutôt aujourd’hui une volonté de gommer les entités, nationales et plus particulièrement régionales car plus proche de la terre, pour prétendre faire de nous de purs « citoyens du monde ». Un être humain se construit grâce à un environnement stimulateur de références sensorielles intimes. La vocation d’un gouvernant, à quelque échelle que ce soit, consiste à travailler au maintien et à l’épanouissement du bien commun. In finé, le bien commun devient majoritairement du patrimoine immatériel, vecteur de lien par l’imaginaire collectif en partage. 

Il n’y a rien de honteux, rien d’extrémiste, à avouer sa préférence un peu chauvine pour un territoire qui nous a construit, à condition évidemment que ce ne soit pas la caution pour le replis et le rejet des autres. L’attachement subjectif à son territoire, qu’il soit d’origine ou de choix, doit permettre l’élévation à l’universel, résultante de la somme de ses différences.

Livré à elle-même et sans apport régénérant, toute construction identitaire s’épuise et conduit aux dégâts considérables du chaos comme au XX° siècle avec les dérives version fasciste ou communiste.

La question, pour notre monde est de savoir si nous allons faire réémerger des patriotismes utiles à la croissance et à l’équilibre des corps sociaux. 

A ce stade … il ne s’agit pas de l’enthousiasme éphémère accompagnant une Coupe du monde de football, comme lorsque la jeunesse sur les Champs-Elysées, galvanisée par la victoire de la France en 1998, a laissé la place quelques temps après à des Marseillaises sifflées avant le coup d’envoi des matches.

La question, c’est de savoir comment bâtir une Europe forte de transmissions du patrimoine culturel complexe, de l’héritage politique pluriel, du goût pour le maintien des identités des peuples par le progrès de l’éducation. C’est le soft power culturel capable de résister à l’individualisme absolu qui a lui même succédé aux excès du nationalisme de droite ou de gauche.


Les années qui arrivent doivent permettre à l’Europe projetée depuis mille ans de s’advenir par la reconnaissance des peuples, pour que chaque individu puisse placer naturellement devant son identité agri-culturelle, le préfixe EURO, pour la survie indispensable du corps social. 

A l’échelle de notre ville de Lesparre-Médoc, il serait souhaitable qu’indépendamment d'une perspective EUROMEDOCAINE, il soit possible d’accéder à minima au talent nécessaire à cette ambition, ne serait-ce qu'en rendant visible ce qui réuni les 52 communes du Médoc, non pas avec seulement 52 fois l'église au milieu du village, mais 52 clochers dans les arbres d'un seul territoire, un futur Parc Naturel de Région pour l'intérêt envers la nature et l'environnement d'une part et un Pays Médoc pour ceux qui l'occupent culturellement et civilationnellement comme un Pays occupé par des Paysans, en charge d'assurer l'autonomie alimentaire de son peuple. 

Ici Com'ailleurs et peut-être Ici Plus qu'ailleurs, comme pour tout autre territoire matériel ou immatériel, le Médoc ne peut exister que dans son rapport agri-culturel entre l'homme et son territoire.



  
Le talent c’est être de son temps, 
le génie c’est inventer son temps.

jpa pour ALV